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Paysages sans verbes

Lahiri Debasish
Date de parution 01/03/2021
EAN: 9789931468776
Disponibilité Manque temporaire
SEPT QUESTIONS A DEBASISH LAHIRI1/ Une autobiographie en quelques mots.Quand j’y repense, tous les moments dont je me souviens étaient des moments tranquilles, où je cherchais le calme dans un excès de bruit. Ce n’est pas que le bruit ait été mon enn... Voir la description complète
Nom d'attributValeur d'attribut
Common books attribute
ÉditeurAPIC EDITIONS
Nombre de pages164
Langue du livrePas de contenu linguistique
AuteurLahiri Debasish
FormatBook
Type de produitLivre
Date de parution01/03/2021
Poids2 g
Dimensions (épaisseur x largeur x hauteur)1,20 x 14,00 x 19,00 cm
SEPT QUESTIONS A DEBASISH LAHIRI1/ Une autobiographie en quelques mots.Quand j’y repense, tous les moments dont je me souviens étaient des moments tranquilles, où je cherchais le calme dans un excès de bruit. Ce n’est pas que le bruit ait été mon ennemi, mais que ceux qui en étaient les auteurs n’aient pas eu de temps pour réfléchir au travail de leurs mains. — A Kolkata, je suis né dans ce remous sonore. C’est ce qui a traversé mon écorce, dès que j’ai d’abord protesté, de toutes mes forces, emprisonnant l’auditoire familial comme le font tous les nouveaux-nés. Dans ma ville natale, la hâte a été injectée dans mes veines bien avant les vaccins ou les vitamines. Il m’a fallu ma vie entière, jusqu’à aujourd’hui, pour m’en débarrasser.En fait, je peux résumer mon passage à l’âge adulte en tant que personne et poète, comme un accord avec l’idée que nous avons vraiment le temps de faire ce que nous voulons, et qu’il y a aussi le temps d’y songer. Enfoncer cette anxiété et cette peur du temps dans la tête des humains est la plus grande et la plus durable injustice que l’homme peut faire à l’homme. Il m’a fallu toute ma vie pour m’en dégager.J’ai reçu de ma mère le cadeau du silence, sans embellissements, mais libérateur. Je n’ai aucun souvenir, le plus flou soit-il, d’avoir partagé avec elle des moments où l’affection s’exprimait ouvertement. Et pourtant, j’ai encore le sentiment très vif de sa résilience stoïque, de sa tendresse silencieuse et de son sens farouche de la droiture qui se déversaient sur moi comme la lumière chaude d’une lanterne par une nuit d’hiver — ma mère se fatiguant la vue pour coudre le bord d’une nouvelle couverture, et moi détournant les yeux d’une leçon de géographie pour la regarder sans ciller, elle l’unique continent de mon admiration. Aucun mot n’était échangé lors de ces nuits où l’électricité était en panne à Kolkata dans les années 1980.Mon père était l’homme d’esprit de la famille. Avant que je n’arrive à l’âge d’écrire, je zozotais et ensuite j’ai parlé, je présume. La prodigalité des mots et la foi dans la nature finale du discours, qui peut continuer longtemps après que la langue a cessé de bouger, me viennent de lui. Et si pendant mes années de formation ma mère était la balise flottante qui délimitait l’arc au-delà duquel nager aurait été tabou, mon père était précisément le désir ardent de nager. Toujours impatient lui-même, il était la substantifique moelle de chacune des aventures de garçon que j’ai pu imaginer. Maintenant qu’il est très âgé, c’est ce qui me manque le plus de lui.Le monde qui était le mien était très étroit en ce qui concerne les relations sociales que j’ai eues ou pas. J’ai toujours craint le rejet et aussi peut-être d’être tourné en ridicule pour les caprices de ma pensée. Cela et une répugnance à des déclarations publiques d’inhumanité, que ce soit à des fins politiques ou personnelles, ou à une fin quelle qu’elle soit (quelque chose qui est étonnamment fréquent en Inde) se sont ajoutés à ma vie active de reclus, visible de tous.Mon père et les Frères Missionnaires de l’Ecole de Don Bosco (que j’ai fréquentée dès l’école maternelle) étaient les compagnons de ce monde incertain où je débutais. Le choix — là où mon cœur d’encre coulera le long de la langue — s’est fait pour moi à l’école. Ce serait l’anglais. — J’ai lu Bibhutibhusan et son Chander Pahar (Les montagnes de la lune) le jour et j’ai imaginé le croissant de lune surplombant la savane à l’ombre du sonnet de Leigh Hunt dédié au Nil. J’ai grandi dans le bilinguisme.On m’a donné un sentiment de culpabilité pour mon hybridité (même si ce ne fut que très bref) lorsqu’à l’université, l’inextricable labyrinthe de la théorie postcoloniale m’a tendu des embuscades depuis le programme de littérature anglaise où elle flânait avec un air narquois. Bhabha, le Minotaure, gardait les portes : impossible d’y échapper. Mais, par chance, je lui ai échappé. Un poète doit le faire.2/ Comment répondre à une injonction brusque : « Définissez la poésie. »Alors de but en blanc je choisis ma réponse : la poésie est la conscience simultanée de mon être et du monde. La rigueur et la pression de cet équilibre délicat que l’on doit maintenir de toutes ses forces, voilà ce qu’est la poésie pour moi.Cette infatigable oscillation entre le grand vent de l’histoire et la culture, ce métier à tisser et cette navette de la conscience, voilà ce qui devrait être la règle d’or pour découvrir la poésie et l’approcher. De simples attributs et des choix formels induisent souvent en erreur. La poésie, comme ceux qui en écrivent finissent tous par le savoir, est cette poche d’air dans l’abdomen qui gêne la respiration ; c’est cette ondulation dans les tripes ; le mouvement d’une migraine qui va de la gauche vers la droite de ma tempe : c’est l’œil ensommeillé qui ne voit pas plus loin que la tête de lit et qui commence à voir au-delà de l’horizon. La poésie est simple, elle transforme et elle transgresse. Dans cette forme bordée de ...