Dissertations en forme de paradoxes contre les aristoteliciens

La présente édition des Exercitationes paradoxicae contra Aristoteleos, dont le premier livre parut en 1624, s’accompagne d’une traduction française en regard. La rédaction de cet ouvrage est interrompue après le deuxième livre, et Gassendi ne l’achèvera jamais. C’est qu’il y a danger à s’opposer ouvertement aux tenants de la scolastique qui dominent alors l’université et organisent la censure. En effet les dissertations, « dans lesquelles sont renversées les bases essentielles de toute la doctrine péripapétique ainsi que de la dialectique, tandis que des opinions nouvelles, ou tombées dès l’antiquité en désuétude, sont solidement rétablies », s’inscrivent bien dans le mouvement anti-aristotélicien que l’on voit se dessiner en France au début du XVIIe siècle, et qui adhère aux thèses essentielles de l’atomisme démocrotéen et du nominalimse médiéval.Le présent ouvrage peut passer pour une œuvre de jeunesse; il en a l’ardeur combative. Mais déjà s’y révèlent certaines préférences pour l’observation et l’expérience sensible, opposées aux raisonnements abstraits sur l’acte et la puissance, la substance et l’accident. Déjà l’on pressent une nouvelle façon de s’interroger sur les faits, que peut-être la lecture de Bacon a inspirée. L’ensemble s’enveloppe d’une sorte de relativisme constructif, tout différent de la vieille logique, avec des pointes hardies contre la métaphysique scolastique.