SOUFFRANCES

Être écrasé par la souffrance, c'est se trouver de plus en plus isolé. Pour passer du mutisme et de l'accablement à la plainte et au cri, il faut la présence fidèle auprès de soi d'une personne à l'écoute, respectueuse et désireuse de notre parole. Cette parole seule est libératrice elle seule nous permet de survivre et, quand cela est possible, de passer à une troisième étape : l'agir transformateur. Pour avoir trop ignoré l'importance du moment de l'expression personnelle de la souffrance, les groupes politiques extrémistes à la recherche d'une « solution globale » n'ont su proposer que des systèmes d'oppression ils oublient ce qui est essentiel à notre humanité : l'expression symbolique de chacun par le langage et son écoute aimante par l'autre. La façon dont certains chrétiens ont parlé sans humanité de valeur rédemptrice de la souffrance, au risque de tomber dans le masochisme, mais aussi et surtout dans l'apathie postchrétienne qui ignore le malheur et la miséricorde, fait qu'ils n'ont pas davantage reconnu aux êtres et aux peuples souffrants le droit à la parole. Les théories inhumaines, contraires au cheminement et à la révélation de Jésus, étouffent les cris qui surgissent de la douleur ou refoulent les questions que l'on se pose à son propos. Dorothée Sölle, dans Souffrances, réveille et invite le lecteur à marcher avec les nombreux témoins qui ont accepté de s'engager pour changer eux-mêmes et le monde que nous habitons.