Sciences Humaines N°379 : Santé mentale des jeunes - Juin 2025

Crises d’angoisse, automutilations, tentatives de suicide… : la détresse psychique des adolescents français ne cesse de s’amplifier depuis 2017. Elle atteint aujourd’hui un niveau critique. Selon Santé Publique France, un lycéen sur quatre a eu des pensées suicidaires ; une lycéenne sur trois. En cause? Un monde anxiogène, où manquent les récits optimistes, une pression scolaire accrue, des relations sociales fragilisées, des usages numériques complexes. La pandémie de Covid, en 2020, a joué un rôle de catalyseur, en isolant brutalement les jeunes et en bloquant leur construction identitaire. Les troubles psychiques ont alors explosé : + 30 % de demandes en psychiatrie infantile, sans redescendre depuis. Le système de soin, déjà sous-doté, a été submergé. Les réseaux sociaux sont aussi pointés du doigt : leur usage intensif peut affecter l’image de soi, donner une image falsifiée des autres et du monde. Leur rôle dans le développement des troubles anxieux, des phobies scolaires et sociales est mis en évidence par des travaux récents. Mais les jeunes développent aussi des stratégies de protection en ligne. Et des initiatives comme l’appli Lyynk, créée par une ado survivante, montrent leur capacité à réagir.Comment prévenir et soigner cette souffrance ? A qui s’adresser ? Quelles sont les approches les plus efficaces ? A partir de quel moment le mal-être doit-il être médicalisé ? Et comment intervenir alors que les pédopsychiatres sont en pénurie ? « On alerte les parents sur un risque de trouble… mais le premier rendez-vous est dans trois ans », s’indigne la pédopsychiatre Marie-Rose Moro. Pour contourner un système à bout de souffle, des nouvelles structures et initiatives se font jour : maison des adolescents dans tous les départements, dispositifs de pair-aidance, applications innovantes. Mais sans un volontarisme politique, il n’est pas certain que ces dispositifs suffisent… Ce dossier vise à comprendre et mesurer l’effondrement de la santé mentale des jeunes, mais aussi tirer la sonnette d’alarme.